Dans l'épisode précédent (Dammarie dans l'Antiquité), nous avions laissé notre village, au début de l'ère chrétienne, sur le territoire de la région romaine dite "La Lyonnaise".
A l'époque Gallo-romaine, selon la tradition pas forcément historique rapportée par Paul Guérin dans sa Vie des saints, au début du 3ème siècle, vers 240, l'évêque Savinien (premier évêque de Sens) et ses compagnons Potentien (futur second évêque de Sens) et Altin (hypothétique premier évêque d'Orléans) arrivent depuis Rome dans le Gâtinais. Peu après, Saint-Pèlerin, (martyr vers 305), supposé premier évêque d'Auxerre, évangélise la Puisaye.
Photo (cliquable) : carte des voies (vertes) et des provinces romaines (limites en rouge) au 5ème siècle. Lutèce est Paris, Genabum est Orléans, Augustobona est Troyes, Autessiodurum est Auxerre, Nevirnum est Nevers, Avaricum est Bourges, Augustodunum est Autun. Dammarie-sur-Loing se situe à quelques kilomètres de la voie de Lyon à Lutèce.
A cette époque aussi, sous le nom de Béthléem, suite à une apparition de la Crèche, serait née la première chapelle de Ferrières, au Nord de Montargis...
La même tradition chrétienne historiquement douteuse affirme que c'est le roi Clovis, plus tard, qui en fera une abbaye dont l'influence et les possessions deviendront immenses. Ce nom de Ferrières rappelle aussi que la région de Dammarie était riche en gisements de fer, les "ferriers" très tôt exploités. Voir notre article à ce sujet .
C'est l'époque où est actif le site gallo-romain de Montbouy. Là, l'amphithéâtre de Chenevières, des ruines près de la ferme de Craon et des restes de bassins de l'autre côté du Loing témoignent encore d'un site thermal et d'un lieu de divertissement pouvant accueillir jusqu'à 6 000 personnes. Lors des fouilles, des ex-voto exhumés d'un bassin ont témoigné des vertus curatives de l'eau du crû…. Origine supposée du nom de Montbouy : le Mont Bovis (montagne du boeuf) : une légende celte prétendait qu'un bœuf enchanté gardait là un trésor dans des ruines…
Photo cliquable : Amphithéâtre gallo-romain de Montbouy (carte postale de la fin du XIXéme siècle)
Avant le 5ème siècle, mais après qu'en 313 l'empereur romain Constantin donne aux chrétiens la liberté de culte (édit de Milan), la population païenne de Dammarie est évangélisée, une chapelle apparaît et le village se constitue sous le nom de Beata Maria de Domna Maria, évoquant la Sainte Vierge, comme tant d'autres villages à cette l'époque.
A cette époque, selon l'historien régional Paul Gache, il existait une villa gallo-romaine sur le site de l'actuel château de Nailly.
Au 5ème siècle se multiplient en Gaule des pouvoirs locaux ou régionaux d'origine militaire ("royaumes"ou regna). "La Lyonnaise" tend à se disloquer, surtout après 476, année où, sous l'effet des invasions barbares, le dernier empereur romain d'Occident, Romulus Augustule est déposé.
Photo cliquable : cette carte montre que Dammarie et sa région n'ont pas été épargnés par les grandes invasions. Alains, Francs, Vandales, Burgondes, Wisigoths, Huns...
En 408, accompagnés de leurs alliés Vandales (d'origine scandinave), des dizaines de milliers d'Alains, nomades venus d'Iran, franchissent la Loire dans la région orléanaise.
Un de leurs groupes, dirigé par le roi Goar, s'allie aux romains et défend la région contre les autres envahisseurs.
Ces Alains sont très mal perçus par les autochtones. Ils défendront pourtant notre région contre les hordes des Huns d'Attila (venus d'Europe de l'Est et d'Asie centrale) et leurs alliés. Celles-ci déferlent en 451, passent vers Dammarie et peut-être dans notre commune, avant d'être défaites près de Troyes, aux Champs Catalauniques.
A cette époque, Ægidius, un général romain défend le nord de la Gaule, dont la région de Dammarie.
En 463, avec ses auxiliaires francs saliens (peuple venu de la Hollande actuelle puis établi dans la Belgique actuelle), dont Childéric 1er, fils de l'hypothétique Mérovée (vers 412 - vers 457) et père de Clovis 1er, (vers 466-511), il arrête près d'Orléans des Wisigoths venus du Sud.
Il meurt en 464.
Il lègue alors à son fils Syagrius (vers 430-486) son commandement et les terres qu'il s'est appropriées entre Loire et Somme, dont celles de Dammarie. Ainsi nait le "Royaume de Syagrius" qui avait pour capitale Soissons.
En 481, Clovis 1er, à 15 ans, devient le roi des Francs saliens.
Son royaume s'étend alors du nord de la Champagne jusqu'à Amiens et Boulogne-sur-Mer.
Il ne tarde pas à conquérir le "Royaume de Syagrius" Soissons.
En 486, Syagrius se réfugie auprès du roi wisigoth de Toulouse, Alaric II. Mais celui-ci le livre à Clovis qui le fait assassiner la même année.
C'est aussi en 486 que l'épisode du vase de Soissons indique clairement que la terre de Dammarie intègre un royaume, celui des Francs, dont une des caractéristiques majeures est l'habile alliance du pouvoir royal et d'un catholicisme en pleine expansion.
Selon l'évêque Grégoire de Tours (vers 539-594), dans son Histoire des Francs, après la victoire contre Syagrius et à l'encontre de la loi militaire du partage, Clovis demanda de soustraire du butin un vase liturgique précieux réclamé par Rémi, évêque de Reims.
Le même qui baptisera Clovis, sous l'influence de son épouse Clotilde, en 496 (date contestée).
Photo cliquable : Clovis, son épouse Clotilde et leurs fils (représentation datant du 14ème siècle, BNF)
En 507, selon la tradition religieuse, partiellement corroborée par des faits historiques, Saint-Séverin, moine médecin de Clovis, meurt à Château-Landon qui deviendra plus tard la "capitale" du Gâtinais.
En juillet 511, un Concile des Gaules a lieu à Orléans, peu avant la mort de Clovis en novembre. Il rassemblera 32 évêques dont la moitié issue du royaume des Francs.
Ce concile adoucit les mœurs du royaume franc, notamment en posant le tabou de l'inceste, régule les fonctions des évêques, organise le partage des tâches entre administration et Église, restaure les liens avec la papauté…
Les prêtres des bourgs prennent l'ascendant sur les curés des chapelles de campagne et acquièrent un peu d'indépendance par rapport à leur évêque.
Les curés de campagne, jusqu'alors incontrôlables, subiront désormais la double tutelle d'un "archiprêtre" et de l'évêque.
Les curés des bourgs s'entourent d'un presbyterium composé de diacres, sous diacres, lecteurs, portiers.
L’alliance de l’Église chrétienne et du pouvoir royal perdurera près de quatorze siècles. Il hâtera l'évangélisation des populations rurales, jusque là païennes, notamment dans la région de Dammarie.
Près de Dammarie, c'est la période d'activité du cimetière païen mérovingien de Cortrat qui a succédé à un cimetière celte puis gaulois.
Clovis laisse un royaume très agrandi, qui, depuis 508 a Paris pour capitale et qui va être partagé entre ses quatre fils; conformément à la "Loi salique" léguée par Clovis et réservant la royauté aux héritiers mâles.
Thierry 1er, Childebert 1er, Clotaire 1er et Clodomir héritent. Ce dernier règnera sur Orléans, la Sologne, Dammarie et la haute vallée du Loing.
Commence une nouvelle période historique que nous ne tarderons pas à évoquer.
A suivre…
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